Thyroïdectomie totale: joyeux anniversaire !
4 ans. Cela fait pile poil 4 ans demain que je n'ai plus de thyroïde et que je vis avec des hormones de synthèse. Lorsque le médecin du travail a découvert des grosseurs au niveau de ma thyroïde en janvier 2004, les choses se sont enchaînées très rapidement. Visites médicales, échographies, scintigraphies, scanner. Le verdict était unanime, il fallait opérer. Rien sur les prises de sang ne montrait un dysfonctionnement de ma glande thyroïde qui a cette époque là était tout simplement énorme : j'avais ce qu'on appelle dans un jargon médical bien complexe un goitre multi nodulaires plongeant. Celui-ci commençait à enlacer ma trachée et à passer sous le sternum. Il allait donc finir par m'étouffer. Je ne m'étais pas rendu compte de certains signes comme cette impossibilité de dormir à plat sur le dos sans oreiller, et d'avoir besoin de trois ou quatre coussin pour me sentir bien. J'ai compris bien plus tard que certaine période de fatigue lourde que j'avais collées au fait d'étudier et travailler en même temps étaient probablement dûes à des dérèglements succincts de ma thyroïde qui règle en quelque sorte le métabolisme général de l'organisme.
D'examens en examens on me répétait la même chose. Il va falloir opérer mademoiselle. L'étonnement de voir quelqu'un de si jeune avec ce genre de problème était récurrent. 21 ans, une thyroïde hypertrophiée, en voilà un cas exceptionnel. Les causes affluaient de toutes part : hérédité, stress, Tchernobyl. Je vote pour une compilation des trois. Pour commencer, ma grand-mère et ma mère ont été opérée de la thyroïde en raison de la présence de nodule, il y a donc bien un facteur familial indéniable. Cependant, j'étais à une période de ma vie stressante, le travail se déroulait dans des conditions de harcèlement moral depuis un événement fortuit et dont je n'étais pas volontaire. Enfin, quand Tchernobyl a explosé et répandue ses particules nucléaires dans notre atmosphère, j'étais âgée de 3 ans. Deux ans plus tard, j'ai vécu dans l'arrière-pays niçois supposé radioactif par endroit, car disons le, le nuage ne s'est pas arrêté à la frontière. La combinaison de ces trois facteurs a peut-être fait que je sois si jeune atteinte et que ce goitre soit si énorme. Mais ce ne sont là que de pures suppositions, le mystère reste tout de même entier.
Je n'ai pas spécialement été gênée par cette opération. Ma grand-mère et ma mère y ayant très bien survécu et étant plus agée que moi, je me disais que c'était encore plus facile pour moi. De toutes manières ça ou être étouffée, je préférais largement qu'on m'ouvre la gorge pour m'enlever la chose. J'ai eu droit à 4 mois d'arrêt maladie avant l'opération. Fatigue, nervosité. J'ai passé mes examens de Deug dans la plus grande des sérénités, d'autant plus que les longues heures d'attente dans les cabinets médicaux m'ont permis de lire et relire les ouvrages au programme.
L'opération a donc été programmée le 8 Juillet 2004 par le professeur Guerrier au Centre Hospitalier Universitaire de Montpellier. Je n'avais qu'une crainte: que ce soit cancéreux. Ce n'était même pas que ça soit un "cancer" qui me dérangeait, puisque je savais que l'ablation serait de toutes manières totale et qu'il y aurait peu de risque à ce que cela s'envenime. Sauf qu'on m'avait prévenue. Si lors de l'opération l'autopsie révélait la glande cancéreuse alors le chirurgien aurait sectionné le nerf qui irrigue les cordes vocales. Et là pour moi ça aurait été le drame. Ne plus pouvoir donner de la voix, c'est-à-dire ne plus pouvoir m'adonner à ma passion de la chanson aurait été une petite mort à elle seule.
Alors je redoutais cela, plus que la chimiothérapie ou les je-ne-sais-quoi qui servent à soigner les cancers. Mais ça ne l'était pas. Houra.
Je me suis rendue à l'hôpital le 7 Juillet 2004 au soir. J'ai dormi là. Debout 6h, premiers calmants. 8h directions la salle d'opération. Je craignais la pose du cathéter de l'anesthésiste. Lors de ma consultation chez l'anesthésiste son infirmière avait eu du mal à me faire une prise de sang. Il n'a pas réussi du premier coup, s'en est excusé et a trouvé son chemin sur le dessus de la main. Il m'a parlé, m'a posé des questions comme pour me faire oublier que j'allais sentir le vide de l'anesthésie. L'infirmière ma caressait la tête pour me détendre. Je dormais déjà à moitié en arrivant là, la nuit avait plutôt été courte dans l'attente de l'opération.
L'opération a duré 3h au lieu de 1h30 prévue initialement. Il se trouve qu'en général, le chirurgien sectionne le bas du coup, sectionne la thyroïde et l'enlève d'un bloc. Sauf que là, la mienne était trop énorme. Ils ont dû la disséquer, bout à bout. Je me suis réveillé assez brutalement en salle de réveil, en gémissant. Je me rappelle avoir entendu l'une des infirmières dire "Elle est chiante celle là au réveil". Je me rappelle aussi les avoir énervés à enlever mon masque à oxygène que je ne supportais pas et qui faisait sonner sans arrêt la machine. Je me rappelle aussi avoir confondu l'infirmier avec ma mère.
Quand je suis remontée, mes parents et mon compagnon de l'époque m'attendaient. Ainsi qu'une voisine de chambre. Un peu plus tard j'ai réalisé en me levant pour uriner qu'il me manquait un morceau. Je sentais le vide au fond de ma gorge. La machine a morphine m'injectait des doses régulièrement. Je sentais des fourmillements dans mes jambes. Il me semble quand même avoir dit quelques bêtises à mes parents, histoire de les rassurer. Je me souviens aussi de cette odeur de gigot froid qui émanait de mes drains…
Les nuits ont été difficiles. Les premiers signes d'hypocalcémie ont fait apparition. Fourmillements partout dans le corps. Paralysie faciale. Crampes. C'est parce que vos "glandes parathyroïdes sont abimées". Les glandes parathyroïdes sécrètent une enzyme qui fixe le calcium dans le sang. Si le calcium n'est pas fixé les fourmillements, la paresthésie faciale et des mains, tétanie, palpitations, spasmophilie font apparition avec perte de connaissance quand la calcémie est très basse. On a finit par me brancher une perf spéciale calcium. Tout allait mieux. Tous les matins j'avais droit à 4 ou 5 tentatives de prise de sang car soi-disant mes veines sont trop profondes. J'étais dans un centre universitaire, il fallait bien que les stagiaires se fassent la main. Mais la tentative dans le pied a été de trop, je pense qu'elles ont vu à mon regard qu'il fallait laisser cette étape matinale à l'infirmière confirmée.
Quand mon taux de calcium est revenu à la normale, on m'a retiré les drains qui avaient maintenant une horrible odeur de viande pourrie et je suis rentrée chez moi, lourde, fatiguée, sans aucune force. J'avais continué à prendre du poids, car depuis Janvier, ça montait en flèche sans véritable explication puisque même si je mangeais bien, je n'avais pas changé de mode alimentaire.
Pourquoi parler de cette opération? Parce qu'elle a été un des facteurs déterminant de mon obésité actuelle et que le dérèglement permanent de mon fonctionnement thyroïdien assuré par des cachets et mon hypocalcémie redondante ne m'ont en aucun aidée à perdre du poids. C'est pourquoi aujourd'hui, il faut absolument que toute entreprise de perte de poids de ma part soit contrôlée et suivie médicalement. Mais je vous en expliquerais un peu plus prochainement sur l'hypocalcémie et les phénomènes d'hypothyroïdie et d'hyperthyroïdie…